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Femme patchoune.
Dans les mains de cette femme pachtoune, et partout autour d'elle, on nous
donne à voir la chose la plus tabou dans notre societe occidentale : les
bouses, les excréments.
Et pourtant, le traitement pictural est tellement éloigné de tout "préjugé
hygiéniste", que cette bouse est peinte avec tout le talent de coloriste de
Gil, comme le plus beau et le plus noble des sujets.
D'ailleurs, ici, la bouse a un sens social plus qu'honorable : c'est la
source de Vie, une source d'énergie quotidienne et écologiquement durable
(par combustion du méthane), telle qu'on l'utilise depuis des millénaires en
Asie centrale et en Inde.
Quelle gageure ! La technique graphique est de facture purement
traditionnelle, afin qu'il n'y ait pas d'ambiguité possible : ces petits tas
bien calibrés, aux superbes couleurs fauves caractéristiques, ce sont bien
des excréments. Oui... et alors ?
En Occident, aujourd'hui, ce type de technique figurative "traditionnelle"
est parfois considérée comme "passée de mode", ou pas assez "novatrice"...
mais, en fait, l'Art figuratif occidental a abandonné tout un champs de
sujets de la "vraie vie", avant même d'oser" les explorer, pour cause de
"petits préjugés bourgeois".
Mis a part quelques oeuvres de Bosch ou, plus récemment, de Barcello, qui a
osé peindre une des choses les plus importantes de la Vie, les excréments ?
Rien de "sale", pour une sensibilité animiste, noblement "primitive",
"proche de la Nature"... "Le Bouddha, c'est de l'excrément" (hotoke wa kuso
nari) , dit même un aphorisme zen japonais.
En effet, tout ce qui vit aboutit nécessairement a l'excrément, lequel doit
être ensuite recyclé "avec respect", en engrais ou en source d'énergie.
Dans ce tableau, les mains de la jeune femme pachtoune sont pleines d'amour
pour ses bouses. Car les bouses représentent le cycle de la Vie, dans ce
qu'il a de plus fondamental, de plus noble en vérité.
Même dans "Les Misérables", Hugo a bien remarqué que le "tout a l'égout"
avait marqué le début de la déchéance morale de Paris, car un homme ignorant
ses déchets, les cachant, se coupe irrémédiablement de la Nature.
Ce superbe tableau fauviste est d'autant plus "révolutionaire" dans son
point de vue, qu'il ose traiter de facon traditionnelle un sujet
hors-normes. Il représente peut-être la dernière "frontière" de l'Art
figuratif.
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